FROM SIGNAL TO DECAY: VOLUME 4, TREVOR MATHISON
SEPTEMBER 7-24, 2023
ARGOS CENTRE FOR AUDIOVISUAL ART
RUE DU CHANTIER 13, 1000 BRUXELLES
Obscurité
mise à part une série de néons jaunes
(bananes?)
Deux grands écrans se font face
huit enceintes sont suspendues
quatre de chaque côté de l'allée
Diffusion de sons et de voix
simultanément ou en cascade
Un lettré afro-francophone commente
Au coeur des ténèbres de Joseph Conrad
(1899)
Un livre qui oppose
l'efficacité coloniale britannique
en partenariat avec les indigènes
à la brutalité de la colonisation au Congo
comme s'il existait une bonne
et une mauvaise colonisation
Une autre voix lit des passages du livre
grandeur des captains, generals, admirals
qui affrontent la mer et ses mystères
pour découvrir, au clair de lune
des contrées lointaines
Le plafond, avec sa charpente en bois
comme les cales sombres d'un navire
Les néons jaunes
comme autant de tavernes
dans une ville portuaire
Plus loin, une femme décrit ses black fellows
avec leurs corps en sueur
white eyeballs, bones, muscles
energy of movement
En face, une voix d'homme
partage ses souvenirs du Congo
avec ses plantation lucratives
de bananes normales
d'huile de palmes, de papayes
et de bananes plantain
qui ne sont pas des fruits
mais des aliments, comme le manioc
qu'il assimile à nos pommes de terre
Sur l'un des écrans
des vidéos imprécises en noir et blanc
Fragments de patrimoine bruxellois
Saint Michel terrassant le dragon
des vitres où les gouttes de pluie dégoulinent
Un autre écran
Des images de mer et de pluie
qui s'imprègnent des récits précédents
même si on leur tourne physiquement le dos
Mouvement de notre corps
qui se déplace d'une voix à l'autre
Présence aussi d'enregistrement
Ondes diffusent
Strates sonores dans notre tête
alors que nos yeux évoluent
dans la mélancolie des images en noir et blanc
Mûrissement des esprits
mûrissement des bananes
importées du Congo
et entreposées
dans les années soixante
dans le bâtiment qui est devenu
le centre Argos
Roshan Di Puppo
Darkness apart from a series of
(banana) yellow neon lights
Two large screens face each other
Eight speakers are suspended
four on each side of the aisle
broadcasting sounds and voices
simultaneously or in cascade
An Afro-French-speaking scholar
comments Heart of Darkness
by Joseph Conrad
(1899)
The book contrasts
British colonial efficiency
in partnership with the natives
with the brutality of colonization in Congo
as if there was a good and a bad
colonisation
Another voice reads a passage of the book
celebrating the greatness of
captains, generals, admirals
facing the sea and its mysteries
to discover, by moonlight
distant lands
The ceiling with its wooden frame
like the dark holds of a ship
The yellow neon lights
like so many taverns in port towns
A woman talks about her black fellows
with their sweaty bodies
white eyeballs, bones, muscles, energy of movement
Opposite, a man's voice
shares his memories of Congo
with its lucrative plantations of normal bananas
palm oil, papayas, plantains
which are not fruits but foods
like cassava
which he likens to our potatoes
On one of the large screens
black and white videos
Fragments of Brussels' heritage
Saint Michael slaying the dragon
windows where raindrops drip
Another screen
Images of sea and rain
permeated by the stories we've just heard
Our body moving from one voice to another
diffuse sound waves
Acoustic layers while our eyes evolve
in the melancholy
of black and white images
Ripening of the minds
ripening of bananas
imported from Congo
and stored in the sixties
in the building which now houses Argos
Roshan Di Puppo
RÉACTIONS
On retrouve ce dispositif depuis un moment dans toute sorte de pratiques soniques et visuelles. Est-ce que le fait qu'il est question de colonialisme change quelque chose par rapport à d'autres artistes comme Anri Sala? Le titre From Signal to Decay renvoie à la fois à une référence musicale et à un pourrissement. Lorsqu'on joue de la musique sur ordinateur le "signal" est le moment où l'on presse une touche du clavier où percute tout autre type d'émetteur. Le Decay pourrait alors faire écho (littéralement) à l'extinction de ce signal, du son qu'il produit. Mathison a créé une structure intitulée Dubmorphology. La Dub est un dérivé du reggae qui en général utilise à outrance des effets d'écho et de réverbération. Le mix est en général fait live. Exemple : Dangerous Match One La désagrégation du signal sonore est alors plus perceptible car plus lente à se manifester. Comme une banane qui mûrit en Belgique ? Ou une chose qui s'oublie de génération en génération ? Reste l'architecture.
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